Reprenons...
Bon. Là, reprenez votre souffle, buvez 3 bières et contemplez le chantier. Votre séance de spéléologie mécanique commence à prendre de la gueule. Vous pouvez prendre 5 minutes pour vous faire photographier en salopette graisseuse. C’est fini ? Bon. Vous avez devant vous un tas de tuyaux, de câbles et de machins barbares qui ressemble à çà (Musique : Genesis « Land of confusion ») :
Au passage et puisque vous en êtes là, profitez en pour tourner la poignée droite et contempler le ballet magique des papillons. En plus, s’il vous prend l’envie de démonter cette petite vis gênante qui empêche le bon fonctionnement du câble d’accélérateur, vous aurez la joie de voir lesdits papillons se présenter par la tranche et disparaître presque complètement. C’est magique et c’est tellement plus joli. Non ?
(Musique : Judas Priest : « Breaking the law »)
Attaquez votre 5° bière et prenez le temps de réfléchir. Vous voyez ces petits tuyaux cannelés au dessus de la rampe, là ?
Ils assurent la dépression des injecteurs. Il va falloir en couper un pour créer un raccord. Autant dire que vous avez atteint à ce stade le point de non retour et qu’il est encore temps de tout remonter comme un lâche. Prenez une profonde inspiration, votre courage à deux mains et votre cutter dans une seule, et… coupez. (Musique : Motorhead : « No remorse »)
Courage. Songez à toutes ces séances de graissage que vous allez pouvoir vous simplifier. Maintenant si vous avez une Triumph à injection, vous aurez pris soin de commander (gratuitement) en plus, un « Té » spécial d’une dimension nettement plus imposante que le truc riquiqui qui est livré d’origine (c’est à ce genre de détails qu’on distingue une moto d’homme, paraît-il). Plutôt que d’essayer bêtement et désespérément d’enfoncer directement ce té dans les demi-bouts de tuyau (vous n’y parviendrez pas) comme nous le fîmes perplexes, une demie heure durant, utilisez le raccord en caoutchouc livré avec le té. S’il est livré, justement, c’est qu’il y a une bonne raison à cela. Au passage un conseil : demandez directement à Scottoiler de vous livrer non pas UN mais DEUX raccords caoutchouc. Celui qu’ils vous envoient normalement doit être coupé en deux et semble un peu court. En pareil cas, mieux vaut un raccord un peu trop long (vous pourrez toujours le couper) que pas assez… Fort heureusement, j’ai pu le jour du montage dépouiller un copain qui avait commandé la même pièce. Le généreux et malheureux garçon… (Musique : Metallica : « My friend of misery »)
Puis branchez le raccord du tube de dépression noir livré avec le kit. Au final çà ressemble à çà :
Ah ah !!… Alors, on se réveille dans le fond ???!!. Content de voir qu’il y en a qui suivent. Bon. Donc çà ressemble en fait à çà :
Maintenant, déroulez votre nouveau petit tuyau noir par le chemin que vous avez prévu de lui faire prendre et… attaquez vous au remontage du tout en sens inverse (boîte à air dessous / dessus, réservoir…) en vous arrêtant après la repose du réservoir (va falloir quand même installer ce foutu kit !). Soyez bien prudents en remontant la boîte à air : il faut que les joints ferment parfaitement et sans formation d’un pli ou d’une « lèvre ». Faute de quoi votre moto préférée va vous gratifier d’un bruit pas du tout musical. Il a suffit pour notre part de ne pas replacer correctement le champignon à tuyaux (qui doit porter un nom beaucoup plus savant, mais le connaître n’est pas nécessaire au fonctionnement du Scottoiler et puis après tout on est dans un tutorial spécial « nuls ») dans ses encoches m’a obligé à rouler dans un bruit de batterie de cuisine, à consulter les grands sages, puis à tout recommencer le lendemain. Au moins, désormais, je sais démonter autre chose sur ma moto qu’un tapis Bagster. (Musique : Deep Purple : « I’m a highway star »)
Avant de revisser le réservoir, bouchez l’extrémité de votre petit tube noir avec le doigt de votre choix (et épargnez-moi vos pensées salaces), et mettez le contact. Si vous entendez un clic bizarre au niveau du réservoir c’est une électro-vanne qui retrouve ses marques ; inutile d’appeler les artificiers démineurs. Faites tourner le moteur en guettant d’éventuels bruits étranges ou glauques. Si vous avez procédé correctement, tout doit fonctionner normalement. A défaut, recommencez. Si çà ne marche toujours pas, soupirez, poussez le tout chez votre concessionnaire ou faites appel à un copain plus dégourdi que vous. (Musique : Abba : « S.O.S. »)
Et puisque vous avez entrepris de faire tout çà, profitez en pour installer des ampoules Philips Motovision (ou un porte-gobelet, ou ce qu’il vous plaire). Cà n’a strictement rien, à voir avec le Scottoiler mais comme çà vous verrez mieux la nuit, vous serez mieux vu au milieu des voitures, et puis de toutes façons, votre après midi d’enfer avec Vanessa et Natacha est foutu depuis longtemps. Alors… (Musique : Jacques Brel : « Jacky »).
Bon. Maintenant que le plus dur est fait, où en étions-nous ? Vous avez maintenant le tube de dépression nécessaire à l’ouverture de la valve. Il va falloir penser à la distribution de l’huile. Cà fait déjà un moment que vous avez zieuté votre bécane sous toutes ses coutures pour réfléchir à l’emplacement final du RMV et de l’injecteur et imaginé le cheminement des tubes et tuyaux qui iront de l’un à l’autre ou au raccord de dépression que vous avez créé. On va donc commencer par la fin et par la pose de l’injecteur.
Pour ma part, j’ai choisi d’utiliser le petit carter de chaîne présent sur quasiment toutes les « 3 pattes » et plutôt idéalement situé compte tenu des contraintes de placement de la pipette d’injection déjà exposées ci dessus. Restait à trouver la vis, les rondelles et le boulon qui allaient permettre le montage du support du tube. Ce ne fut pas sans difficulté et le résultat était de bric et de broc. Depuis j’ai trouvé au fond d’une boîte de la quincaillerie à peine plus adaptée. Donc, comme encore une fois, le kit ne prévoit rien, pensez-y avant de vous lancer. Et n’oubliez pas qu’une vis à « grosse » tête empêchera le tube d’être bien positionné. (Musique : Genesis : « A trick of the tail »)
Bon, maintenant l’injecteur est monté, la pipette bien placée « entre 6 et 7 heures » sur le flanc de la couronne. Prenez bien soin d’essayer de tourner la roue en avant et en arrière pour vous assurer que les écrous qui bloquent la couronne ne frottent pas et que vos arsouilles futures n’auront donc pas pour effet de hacher menu votre beau travail ni de ruiner votre patience. A ce propos j’ai perdu le premier jour le petit collier de serrage que vous apercevez sur la photo (n’oubliez pas de bien le resserrer) et mon joli système s’est mis à sagement déposer une goutte d’huile tous les kilomètres sur 50 bornes d’autoroute. Il a toutefois parfaitement résisté à cette sinistre torture. Scottoiler c’est du solide. (Musique : L. Cohen : « Hallelujah »)
Maintenant, prenez le temps de repérer l’endroit idoine où vous allez fixer votre RMV à l’aide de l’un des 57 systèmes proposés avec le kit. Encore une fois, il faut que les réglages soient accessibles et que le dispositif soit placé avec suffisamment de pente. N’oubliez pas que l’huile descend par gravitation. A l’horizontale, çà marche encore, mais moins bien. D’autant que le liquide peut aller et venir au gré de vos accélérations de fusée et de vos freinages de trappeur. Prenez bien le temps de réfléchir en descendant une sixième bière (Musique : Led Zeppelin : « Dazed and confused »)
Puis raccordez le tube noir permettant l’ouverture de la valve, le tuyau d’écoulement d’huile, et fixez tout le bazar. Cà y est ? Bon, pour ma part, j’ai donc installé le RMV dans le flanc droit de la selle au dessus du boîtier d’alarme exigé par ma chère (à tous les sens du terme) compagnie d’assurance. Voilà une photo prise une fois le travail provisoirement achevé. Vous pouvez admirer le tuyau d’écoulement d’huile (c’est ce liquide verdâtre comme du sang d’alien), le tube noir pour mettre le tube en dépression au démarrage du moteur, les réglages de débit, le tube de trop plein (qui sert aussi de « bouchon » entre deux remplissages).
N’étant pas tout à fait satisfait du résultat avec ces kilomètres de tubes et de tuyaux en trop, j’ai tout retaillé à la bonne longueur pour finir par le replacer grosso modo au même endroit.
Bon, maintenant il faut raccorder le tout et faire circuler le tuyau d’arrivée d’huile le plus discrètement possible en laissant un peu de jeu pour permettre au bras oscillant de débattre sans arracher tout le bastringue. En utilisant la bande de support de gaine en caoutchouc fournie avec le kit et dans laquelle vous pouvez découper au moins 5 ou 6 « attaches », en nettoyant et en gratouillant au besoin les supports, et en fixant le tout avec la super glu fournie, çà tient parfaitement sous un bras oscillant par exemple. En tous cas c’est là que nous avons finalement choisi de faire circuler le tuyau. Attention : sur certains bras alu, il vaut mieux utiliser une colle epoxy au séchage plus long. Prévoyez une bonne quantité de papier absorbant et d’essence ou de produit décrassant : les dessous d’une moto sont généralement furieusement crades. (Musique : P. Gabriel : « Digging in the dirt »)
Au passage, profitez de tout ce travail pour nettoyer les coins maculés de graisse épaisse et de saloperies en tous genre ramassées au long de vos périples (bras oscillant, carter de pignon de sortie de boîte…). Normalement avec de l’huile filante, ils ne se reformeront plus. C’est une nouvelle vie saine et propre qui vous attend.
A propos, vous avez noté que je parle de « nous » depuis un moment… Ce n’est nullement une dérive monarchique de mon esprit. Vous pouvez en effet recourir à une variante très efficace pour vous simplifier toutes les taches ci-dessus : faire appel à un copain qui exécutera pour vous d’un geste sûr et précis absolument tout ce que je vous détaille depuis le début. Pendant ce temps, vous, vous êtes occupé déjà à changer les CD’s, à décapsuler les bières, à lire et traduire les modes d’emploi en grand-breton et à prendre des photos pour l’édification des tout-aussi-nuls-que-vous… Tout un tas de choses qui exigent des mains parfaitement propres et un point de vue « stratégique » sur la liste des taches à effectuer. Ce sera particulièrement appréciable quand il faudra se faufiler face contre terre sous le bras oscillant plein de cochonneries qui pourraient salir votre beau pull en cachemire tout neuf. (Musique : Les plus beaux arias de la Légion Etrangère – Volume 7 : “Rampe, charogne”).
Je profite de cette parenthèse et de ce beau cliché pour saluer mon fort sympathique acolyte et mécano d’un jour que je vous présente dans une situation quelque peu incongrue, j’en conviens. Dites bonjour à Tom (vous avez vu comme il a un beau sourire malgré les circonstances ?). C’est grace à lui que j’ai découvert les vertus du Scottoiler et que j’en ai acquis un, à la condition qu’il me prête assistance car je suis un être tyrannique, veule, profiteur, vénal, lâche, hypocrite, intéressé et couvert de pustules. Encore mille mercis Tom. La prochaine fois, je t’apporterai des bonbons, parce que les fleurs, c’est périssable… (Musique : JJ. Goldman : « La vie par procuration »)
Pour que la morale soit sauve, je précise quand même qu’à la suite d’une petite erreur de remontage et souhaitant revoir le travail de la veille, j’ai de nouveau exécuté personnellement avec mes petites mains toutes sales à moi, et grace aux cours pratiques de Tom, tout le boulot ci dessus sous l’œil critique de l’ami Grobeumeu. Ce qui me permet d’écrire ces lignes la plume et la tête hautes. La précision est importante : ceux qui m’ont déjà vu tenir un tournevis savent en effet que si je suis à peu près capable d’effectuer tout ce travail, c’est que N’IMPORTE QUI peut y parvenir.
Bref. Maintenant que tout est en place et que vous avez raccordé tous vos tuyaux, tubes, pipettes et circuits en tous genres au RMV, remplissez celui ci d’huile en pressant sur le flacon pour chasser l’air du système comme indiqué sur le fucking manuel (attention quand même à assurer le raccord du tube de remplissage avec le RMV avant de presser le flacon comme un sourd, sinon votre teinturier va grandement s’enrichir à vos dépens et vous allez passer votre nuit à nettoyer votre garage).
Réglez la molette du RMV sur « prime ». Démarrez et attendez que çà goutte. Vous réglerez ensuite le débit pour obtenir en moyenne une goutte toutes les 30 à 60 secondes. Pour le moment, ma valve est positionnée sur 4. Montez un peu le réglage par grands froids (l’huile s’épaissit) et par temps de pluie ou sur route très poussiéreuse. Baissez le par temps chaud (ou utilisez l’huile spéciale « pays chauds »). En jouant sur les huiles et au besoin sur les réglages, le système peut ainsi fonctionner de – 10° à 50°. Vous irez ainsi de Stalingrad à Tobrouk sans trop de problèmes.
Mes observations après quelques jours ? Une chaîne aussi grasse que les frites préparées par ma mère, et beaucoup plus propre qu’avant. Quelques gouttes autour de l’axe de la roue arrière et deux ou trois sur l’intérieur de la jante. Vraiment pas de quoi fouetter un lion, d’autant qu’on les essuie d’un revers dédaigneux de papier absorbant sans l’aide du moindre produit.
Attention à ne point trop ouvrir les vannes malgré tout car si l’huile abonde (ou si la pipette d’injection n’est pas montée comme précisé ci dessus), c’est le flanc gauche du pneu qui pourrait finir déguster avec les conséquences fâcheuses qu’on peut imaginer lors d’une belle prise d’angle… Reste à voir comment le système tiendra dans le temps avec un peu de pratique. Mais si vous êtes prêt à consacrer les trois heures (maximum, maintenant que vous savez comment faire
) nécessaires à l’installation du schmilblick, la corvée de graissage ne sera plus qu’un lointain souvenir, vous et votre chaîne vivrez longtemps, serez heureux et aurez beaucoup de petits kilomètres à votre actif. Amen. (Musique : Queen : « A kind of magic »)
Un gros bizou à Tom et à Grobeumeu pour leur assistance et leur participation à la réalisation de ce documentaire.
http://www.scottoiler.com/