Mai 1954, dans l'indifférence générale, les troupes françaises au Tonkin ont plié le genou (ensuite les gaules) à Dien Bien Phu devant le général Giap. C'est précisément en cette fin mai que je me suis décidé à venir au monde dans le centre de la France, d'une mère française et d'un père américain trop vieux pour aller s'embourber dans ce qui à succédé à la guerre d'Indochine, c'est-à-dire la guerre du Vietnam...
Merci la Guerre inutile, on en a tiré quelques bons titres de Bob Dylan, Joan Baez, Jefferson Airplane, The Doors et tant d'autres. Comme le bon vent vient toujours de l'ouest, on s'est tapé mai 68. A quoi bon, il faut aller chercher dans la littérature russe (Gogol entre autres) pour trouver une bureaucratie comparable à celle que nous connaissons en 2020. Il faut remonter à la reine Victoria (la grand-mère de l'Europe) pour trouver une société aussi corsetée, coincée, bien-pensante que la nôtre aujourd'hui.
Faut bien parler de moto, là on recule vers 1966, année de mes douze ans. Année exceptionnelle pour les vins de Bourgogne au cours de laquelle la femme devint l'égale juridique de l'homme (parce que Cindy Crawford venait de naître) et où Lee Marvin obtenait l'Oscar du meilleur acteur pour l'excellent western Cat Ballou que j'ai eu la chance de voir en projection post-scolaire dans mon collège de cambrousse.
Bon, un beau dimanche d'été de 1966, lors que je prenais un rafraichissement avec Mère sur la terrasse d'un bistrot solognot, voila t-y pas que débarquent deux extra-terrestres bottés de cuir sur deux Velocette 500. La totale, Cromwell, Climax, la classe. Les deux motocyclistes d'Orphée de Jean Cocteau sorti en 1960, précédant la Mort incarnée par Maria Casares. A la réflexion, peut-être pas. Sûrement gentils. C'est décidé, je serai motard jusqu'à l'âge de quatre-vingts ans et plus si affinité.
Avant de m'asseoir dans une Triumph, j'ai du passer en 1968 par la case Malaguti, quatre vitesses au pied. Pas facile avec les pédales de vélo obligatoire. Merci, Monsieur Pierre Laval d'avoir signé le 5 juin 1943 ce décret stupide portant sur les nouvelles catégories de deux roues à moteur. Il aura fallu attendre 1983 pour que nos pétoires "sportives" soient enfin débarrassées de ces inutiles et dangereuses pédales.
Que de tendres souvenirs au guidon de cette superbe Malaguti Olympic avec son réservoir en forme de lévrier. J'ai rapidement tordu l'arrière du cadre (en acier à ferrer les ânes) à force de transporter de girondes gamines qui m'aidèrent à poursuivre mes "universités" dans les clairières secrètes et ensoleillées du Val de Loire...
Mais, les seize ans du permis moto approchant, il devenait de plus en plus question d'envisager une monture plus en rapport avec mon "bagage scolaire"...
Si vous êtes sages, vous aurez bientôt la suite...